« tu es un miracle » avait-il murmuré à son oreille. un miracle était le mot qui avait décrit les premiers instants de sa vie. elle allait combler le vide qui avait empli l'existence de ces nouveaux parents. certains diront qu'une nouvelle fille à papa était née, ils n'auront sans doute pas tord. d'autres penseront que ce couple a finalement obtenu une considération à leur prière. julia et mark avaient tout essayé pour avoir un enfant. après de nombreuses fécondations, plusieurs fausses couches, ils s'étaient résignés à adopter, à voyager dans un pays d'asie pour donner à un enfant la chance de vivre ailleurs. alors même qu'ils commençaient à remplir les papiers, la bonne nouvelle est arrivée. julia attendait un enfant, leur enfant. roselia, rosie, l'ange de leur vie. elle a eu une belle vie, trop belle sans doute. en bonne fille unique, elle obtenait tout. elle en donnait beaucoup. de bons résultats scolaires, de l'intérêt pour le monde, un gout pour l'ailleurs. roselia était l'enfant unique rêvée, sans doute.
le noir a finalement recouvert ce rose criard qui auréolait sa vie. d'un coup de revers, il avait pris la place du bonheur, des sourires heureux. le rose manquait à l'appel, tandis que ce qui n'était au début qu'un simple gris terne avait pris une couleur agressive.
« j'aimerais que tu me promettes de faire attention à toi, de prendre soin de ton père. » elle avait promis, les yeux baignés de larmes. elle avait regardé sa mère avec une profonde tristesse. elle la regardait défaillir, mourir. un cancer du sein dépisté trop tard, il n'y avait plus rien à faire que la soulager. la vulnérabilité qui l'avait habité les dernières semaines de sa vie avait marqué à jamais l'esprit de roselia. elle aurait préféré préparer sa rentrée future au lycée, parler nouveaux livres et shopping avec sa mère. elle aurait préféré se promener dans les boutiques au bras d'une femme pleine de vie en refaisant le monde. le monde de rosie s'était effondré alors qu'elle n'avait que quatorze ans. elle avait enterré sa mère trois semaines avant d'entrer dans un nouveau monde. elle avait perdu ses repères, son équilibre. elle avait perdu sa mère tandis que son père lui, avait semble-t-il définitivement perdu le sourire.
assise dans le fauteuil de cuir du salon, son téléphone portable à l'oreille, elle parlait à cette boîte vocale. elle parlait à ce vide. jamais plus personne ne lui répondrait. jamais plus personne ne l'entendrait. elle s'accrochait aux quelques mots que pouvaient prononcer sa mère, elle pouvait ressentir la joie en les écoutant. elle écoutait et puis, elle se confiait.
« tout est tellement différent depuis que tu n'es plus là. tout a changé. il pleurait encore, maman. j'entendais ses sanglots étouffés, impuissante, appuyée contre la porte de sa chambre. j'ai l'impression qu'il ne se remettra jamais. maman, tu lui manques, tu sais. à moi aussi. » elle laissait souvent les sanglots l'envahir. elle espérait que sa mère l'entendait. lui parler était une source de réconfort, comme si le lien qui les avait uni n'avait jamais cessé d'exister. chaque fois que la boîte vocale était pleine, elle supprimait les messages pour en recomposer de nouveau. pour continuer encore et toujours d'entendre la voix si expressive de cette femme qu'elle avait tant aimé.
elle a toujours eu plus d'amis de sexe masculin, sans savoir pourquoi. elle ne s'en ai jamais plaint d'ailleurs, ça évite les crêpages de chignon sans doute. sa bande d'amis étaient constitués de cinq garçons et de deux filles. pour roselia, ses amis étaient une source de bonheur, ils comblaient un manque affectif perdu, ils permettaient à la flamme de rester allumer dans le fond de ses yeux. avec eux, elle partageait des moments qu'elle n'aurait plus pensé revivre. elle vivait des instants qui lui redonnaient le sourire.
« putain rosie, t'es trop forte ! t'es pas censée gagner tu sais ! t'es une fille ! » leurs soirées jeux vidéo se terminaient souvent de la même façon. les garçons se retrouvaient vaincus par roselia. elle était quasiment toujours vainqueur, même aux jeux de violence. ce genre de soirée se finissait souvent en bataille d'oreillers, en éclats de rire. elle revivait auprès d'eux. parmi cette bande, il y avait
charlotte et maël, ses meilleurs amis depuis la maternelle, depuis la crèche même.
la danse a toujours été sa passion. elle ne vivait que pour la danse, pour ainsi dire. de la danse classique à la danse contemporaine, rosie voulait prouver qu'elle était la meilleure. elle voulait rendre son père fier, que sa mère la voit et l'encourage toujours plus. elle a commencé à danser alors qu'elle commençait à marcher et ne s'est jamais arrêté. son échauffement terminé, elle attendait. seule. elle était toujours la première, tant ce cours lui apportait plus qu'elle n'aurait pu en attendre de lui. elle attendait sur quelques notes, s'élançant vivement en quelques pas. elle dansait, oubliant le reste autour d'elle. source de réconfort, de bonheur qu'elle n'avait pas connu jusqu'alors. la danse lui avait apporté tellement de joie que depuis qu'elle avait huit ans, elle ne vivait que pour cela. elle n'avait vécu que pour cela pendant plus de huit ans. la danse lui avait ouvert des portes. les portes des sourires francs, des rires sincères. les portes d'un bonheur sans merci. elle se donnait tellement qu'on lui demandait si ça allait. elle souriait.
« cela ne pourrait pas aller mieux. » et elle repartait de plus belle. mais ce jour-là, elle savait que ce cours avait plus d'importance que n'importe quel autre. les rôles pour le spectacle de décembre allaient être donnés. un spectacle important, dans une des salles de los angeles
« tu sais, rosie, ça ne sert à rien de t’entraîner comme ça. » eu regard, elle l'interrogeait, elle ne comprenait pas. avait-elle oublié quelque chose d'important ? elle avait beau essayé de se souvenir d'un détail qui lui aurais échappé, elle ne se souvenais de rien. trop concentré par ce rôle qu'elle voulait. ce rôle qui la mettrait sur le devant de la scène, seule, pour un solo unique.
« il y a deux rôles importants, tu sais. » elle le savait et elle y avait vu une chance d'être acceptée. elle se souvenait de son professeur annonçant cela et de son sourire qui s'était agrandi. elle n'avait rien n'écouté de plus, ce jour-là.
« c'est des rôles sont en duo, rosie. » ses rêves s'effondraient. elle n'avait rien préparé, elle n'avait pas de partenaire. son rêve tombait en miette en quelques mots. maël était son meilleur ami et un excellent danseur. elle l'avait rencontré il y a une dizaine d'années, à l'école maternelle. il avait été ton premier ami, le meilleur de tous. « oh putain ! » elle n'y croyait plus jusqu'à ce qu'il lui tende la main.
« viens, viens avec moi. » et c'est avec lui, qu'en quelques minutes, portés l'un par l'autre, ils avaient dansé. dans une improvisation parfaite, ils se comprenaient si bien. un regard suffisait. ce duo, ils l’ont obtenu. ils ont montré à des centaines de personnes de quoi ils étaient capables.
« terrence, enfin tout le monde m'appelle terry ! » il avait le sourire digne d'un acteur de cinéma, un sourire qui faisait chavirer les filles. elle était restée muette longtemps, observant avec insistance la beauté de ses yeux. elle avait finalement réussi à se présenter, loin de s'imaginer qu'elle allait l'épouser sept mois plus tard. l'amour leur était tombé dessus, un coup de foudre comme on en voit rarement. leur vie, ils ne l'avaient pas imaginé ainsi. elle était commencée sa vie professionnelle, il était militaire. elle rêvait de voyage et d'aventure, lui en avait assez de partir. ils étaient si différents et pourtant si passionnés, l'un comme l'autre. ils s'aiment sans limite, ils partageaient leur quotidien comme deux amis, deux âmes sœurs. elle n'a pas été étonnée de le voir poser un genou à terre si rapidement tant elle l'aimait. et leur mariage avait été fait dans les règles. de l'église à la lune de miel, la tradition avait été respecté. c'était un mariage de princesse comme rosie avait tant imaginé. un mariage qui avait malgré tout laissé un goût amer lorsqu'elle avait vu la femme auprès de son père, celle qui avait finalement remplacé sa mère.
il avait été appelé en mission, pour quelques mois. il avait choisi de s'engager, elle était contrainte d'accepter cette condition de femme de soldat. elle avait finalement compris, en voyant arrivé les hommes dans des costumes de cérémonie devant leur immeuble que quelque chose était arrivé. devant ces hommes qui avaient frappé à la porte, elle s'était effondrée. ces hommes, elle les connaissait pour être des proches de son mari. ils étaient ses amis et leur visage trahissait le chagrin qui les avait envahis.
« je suis désolé rosie, terry a été tué au combat en afghanistan. » il n'y avait pas vraiment de formalité militaire dans cette annonce, elle le savait. elle avait déjà vu ce genre d'annonce à la télévision. leur mariage n'avait pas duré un an. moins d'un an de bonheur qui venait de s'écrouler sous ses yeux. pour ne pas se noyer dans son chagrin roselia avait choisi de s'enfermer dans le travail. le sport et la danse étaient son seul remède pour ne pas y penser à chaque instant. elle avait fini par ne plus se sentir vulnérable. son alliance autour du cou, ses visites hebdomadaires au cimetière avaient cessé de la faire pleurer. pour terry, elle voulait recommencer à vivre.
elle fait partie de deux associations. la première est une association venant en aide aux femmes atteintes d'un cancer féminin. en mémoire pour sa mère, elle avait choisi d'aider ses femmes en les soutenant, elle leur apportant un soutien. la mort de sa mère avait changé beaucoup de choses. sa façon de voir les autres avaient été bouleversée. aujourd'hui, elle regardait ces femmes avec admiration. cette association a également pour but de sensibiliser les femmes au dépistage. rosie est une participante active. la seconde association prend en charge les veuves de guerre, tout comme elle. à la mort de terry, rosie a été aidée par les membres de cette association. à son tour, elle a choisi de donner de sa personne pour offrir son soutien.
elle peut parfois se montrer très garçon manqué, c'est une manière pour elle de se démarquer. elle passe de nombreuses heures en tenue de sport. elle ne porte des tenues plus féminines que lorsqu'elle doit sortir ou lors de réunion importante.
elle dort encore une peluche, la toute première qu'elle a eu. elle lui rappelle sa mère, elle la parfume régulièrement avec le parfum que portait sa génitrice, elle se sent ainsi toujours proche d'elle. elle a gardé une âme d'enfant, malgré elle. l'odeur de sa mère lui permet d'être réconfortée depuis que terry n'est plus là. ce vieil ours a une forte symbolique.
elle ne sait pas cuisiner et n'aime pas ça. elle préfère manger vite - et mal. elle n'apprécie pas de passer des heures devant les fourneaux. quand elle doit recevoir quelqu'un, elle s'arrange pour se faire livrer des pizzas ou des plats asiatiques. elle aime les fast-food et pourtant, elle recommande à ses élèves de les éviter. les fruits sont les seuls aliments sains qu'elle mange. elle adore ça.
elle fait constamment du sport. elle n'est pas le genre de prof qui regarde ses élèves faire. s'ils courent, elle court avec eux. peu importe l'activité, elle prend plaisir à participer et à donner chacune de ses techniques. lorsqu'elle se retrouve au studio de danse, l'ambiance est plus calme généralement. elle songe à donner des cours de zumba, la nouvelle mode semble-t-il.
elle rêve d'une vie de famille. en attendant de se reconstruire une vie auprès de quelqu'un, de prendre son temps pour recommencer une véritable histoire à zéro, elle a adopté un chat. pour ce qui est des hommes, elle a beaucoup de mal à s'en approcher. elle les évite plus ou moins, de peur de revivre une expérience trop douloureuse.
si roselia a un côté aventurière, elle a peur de mal de choses. des insectes premièrement, de l'orage mais également des canards et des clowns. des traumatismes d'enfances d'après son père. et pourtant, elle espère pouvoir visiter un jour les pays d'asie et l'australie. elle se contente pour le moment de se reconstruire.
elle parle couramment le français. sa mère étant française, elle a grandi en apprenant l'anglais et le français. elle a déjà été plusieurs fois en france d'ailleurs, même si la plupart de sa famille a choisi de vivre aux états-unis. elle a passé de nombreuses vacances à miami, chez sa grand-mère maternelle, à chicago chez sa tante ou encore à new york chez son oncle. elle apprécie les voyages et de découvrir autre chose. elle aurait aimé pouvoir le faire avec sa mère plus longtemps. elle aurait aimé le faire avec son mari aussi.